Rock Altitude

Marche à l'ombre

Marche à l'ombre. C'est de saison. Voici quelques gouttes de fraicheur musicale pour accompagner les torrides journées de ce début d'été, piochées au fil de quelques chroniques de disques dans les Inrocks et Rolling Stone (la version américaine). Pas toujours aisé, faut-il le préciser, de trouver quelque chose de rafraichissant, entre gros riffs de saison pour brûleur d'alsphate et tubes de l'été de circonstance.

Première mise au frais, donc, avec une pièce planante des néo-baba-cools de Vetiver, « ces songwriters hirsutes et indociles », selon Jean-Daniel Beauvallet des Inrocks, emmenés par le folkeux Andy Cabic (photo ci-dessus). Je vous ai déjà touché un mot de Devendra Benhardt. pape du neo-psychédélisme folk que véhicule la scène New Weird America. Il joue d'ailleurs avec eux. Ce sont en quelque sorte ses petits cousins, ou pour le moins une belle brochette de quelques uns de ses fils spirituels. Après avoir écouté Red Lantern Girls, et en fonction de votre degré d'élévation cosmique, vous aurez toujours le choix entre fumer un pèt, engager une partie d'amour libre avec vos copines hippies, ou continuer à lire le dernier Michael Connelly en sirotant une nième Desperados (ma préférence du jour).

Vetivers - Red Lantern Girls

On change à peine de registre avec Luke Temple et leur ritournelle folk Make Right With You, ça permet de reprendre un petit peu ses esprits, quelques brins d'herbe accrochés aux cheveux. Il fait toujours aussi chaud, mais on commence à respirer un peu. C'est peut-être le moment de balancer la sauce avec Hands, une chanson des Raconteurs (photo ci-contre) qui nous entraine encore un peu plus loin sur le pente du revival hippie, version électrique. Quoiqu'il en ressorte parfois un son assez « eighties ». Le groupe est né de la rencontre entre le songwriter Brendan Benson et Jack White, des White Stripes. Je vois bien que ça vous en touche une (d'oreille). Vous en prendrez bien une autre pour la route ? Ce sera Store Bought Bones. Je vous sens bien parti(es) pour la suite...

Luke Temple - Make Right With You

The Raconteurs - Hands

The Raconteurs - Store Bought Bones

La suite, ce sera avec Phoenix (photo ci-contre). Il y a un moment que le succès international de ce groupe parisien m'interroge. J'étais persuadé d'avoir écouté leur dernier album (« It's Never Been Like That ») et d'en avoir gardé une assez mauvaise impression. Cette impression n'était pas la bonne. La vérité est que je trouve leur musique plutôt fraiche et originale. Très british, ces petits frenchies. Entre les Smiths, les Strokes et Cyndi Lauper, nous disent les Inrocks. Ouais, je les verrais bien chasser sur les terres de Gomez, aussi, ou pourquoi pas sur celles des Stranglers. Quand même une sacré bouffée d'air, un zeste de maelstria pop française qui n'a rien à voir avec la french touch électro... Suffisant pour justifier d'y jeter une oreille.

Phoenix - Long Distance Call

Phoenix - Second To None

J'en oublirais presque de vous suggérer d'en jeter une, d'oreille, sur le dernier single de Primal Scream, sorti du nouvel album Riot City Blues . Qui parlait à l'instant d'inviter quelques copines hippies ?

Primal Scream - Country Girl

Néo-psychédélisme folk

Petit clin d'oeil à l'un des leaders les plus inspirés (hallucinés ?) du New Weird America, mouvement musical américain né au début des années 2000, entre néo-folk et psychédélisme.

Il s'appelle Devendra Banhart, et c'est Naïve qui distribue ses disques en France. Je l'ai découvert pour la première fois sur Youtube.com, dans une version live de I Feel Just Like a Child (vidéo ultra-conseillée) sur le plateau de Taratata (many thanks, Naguy !).

On le compare volontiers à Syd Barret, membre fondateur totalement barré du Floyd, ce dont je m'étonne à peine. Ayant moi-même largement cotoyé dans ma jeunesse les restes de déliquescence hippie de la fin des seventies, avec le recul et le regard "acide" et sans illusions d'un enfant du No Future, j'avoue que j'accroche pas mal à ce revival un brin déjanté, qui cultive volontiers une certaine forme d'instabilité mentale.

Dans mon cas, je préfèrerais parler d'instabilité sociale, ou plutôt d'un penchant à l'inadaptabilité aux normes sociales, d'ailleurs pas mal cultivé dès la prime jeunesse. On le paye par certains côtés, mais on peut aussi s'extasier encore sur les dérives psyché-folk d'un Devendra Banhart à quarante balais passés, et ça mon pôte, c'est pas donné à tout le monde... et ça vaut de l'or !

Devendra Banhart - Long Hair Child

Devendra Banhart - Now That I Know

John Butler Trio live à Taratata

Inédit : "private session" entre Jagger et Beth Orton

Voici le genre de rareté que vous ne trouverez jamais ailleurs que sur un réseau peer-to-peer. De quoi mesurer, tout simplement, ce qu'on est sur le point de perdre avec le projet de loi DADVSI. Je vous fais cadeau d'une petite session studio entre Mick Jagger et Beth Orton téléchargée sur kazaa un week-end de l'hiver 2002.

Du pur bonheur ! Bien sûr, il y a des droits d'auteur et d'édition qui courent mais aucune maison de disques ne peut revendiquer la paternité du moindre copyright sur cet enregistrement. On y entend Mick Jagger et Beth Orton éprouver quelques difficultés à se mettre d'accord avant d'entonner une reprise des Stones. Dans le temps, on appelait ça un bootleg : une chute de studio ou une session live pirates.

Mick Jagger & Beth Orton - Rolling Stones Cover

Humeur d'un jour #4

Neil Young - Old Man

KT Tunstall, The Black Horse and The Cherry Tree

« En écoutant KT Tunstall chacun comprendra pourquoi le business anglais de la musique se porte toujours aussi bien », dixit Bob Lefsetz, chroniqueur acide et analyste impitoyable de la scène et de l'industrie musicales contemporaines aux Etats-Unis. Et de regretter amèrement qu'aucun label américain n'aurait jamais signé cette petite écossaise sans artifice, « à la coiffure informe et habillée comme une étudiante de première année ».

En France, tout le monde connait KT Tunstall, non ? Au moins depuis que le refrain de  sa chanson Black Horse & The Cherry Tree illustre une pub du fournisseur d'accès Alice (Telecom Italia) qui passe en boucle à la télé. C'est une version live de cette chanson qui a fait craquer Bob Lefsetz, à laquelle  les zappeurs avertis ont déjà pu assister sur la scène de Taratata. Seule avec sa guitare folk et tout un appareillage commandé au pied, elle commence par enregistrer toute seule les quelques boucles qui vont constituer son accompagnement. Du grand art ! Une vrai fraicheur !

The Show Must Gomez

Gomez, c'est à la fois une résurgence du rock progressif à l'anglaise, celui qui nous a notamment valu Pink Floyd et Genesis, et un "revival" du son british pop des années 60 et 70, avec une consonnance bluesy et psychédélique réactualisée sans aucun complexe, sur la base de nombreuses expérimentations sonores.

De la rétro-pop d'Oasis au trip-hop de Portishead, en passant par le space-rock de The Verve et  Radiohead, pour reprendre la classification  d'un chroniqueur américain, on ne retrouve nulle part cette tonalité blues assumée, sinon avec ce quintet folk-pop un brin déjanté originaire de Southport, dont on ne peut pas dire qu'il a la gueule de l'emploi. Ce qui ne l'a pas empêché de recevoir le prestigieux Mercury Music Prize pour le meilleur album de l'année en 1998, avec son tout premier disque, "Bring It On" (Virgin - 1998).