C'est manifestement très tendance, aujourd'hui, de remplir les bacs de disques de nouveautés qui sont autant de ressucées dans le genre vieux rock des familles. Et le nouveau double album des Eagles, qui n'étaient pas rentrés en studio depuis 28 ans, n'échappe pas à la règle.
Il vous faudra faire la part des sucreries trop mièvres et des mièvreries trop sucrées, tendance FM américaine lourde, qui peuplent cette livraison de 20 titres que j'avais pré-commandé il y a déjà trois semaines, et dont j'ai fini par trouver une copie pirate avant la sortie officielle, le 30 octobre.
J'ai quand même essayé de vous éviter de sombrer dans la sieste, avec une petite sélection de cinq titres qui ont fini par retenir mon attention après moultes écoutes, et qui vous convaincront peut-être d'acheter l'album - on dirait même qu'un morceau de Prince s'est glissé au milieu. Ils vaudraient bien le détour, mais les Eagles ne vendent pas à l'unité ni des EP 5 titres sur iTunes.
C'est quand même un peu étonnant, ce retour en grâce de tous les vieux croulants de la planète rock - des Rolling Stones à Police en passant par Status Quo ou Genesis -, avec des disques prétextes à de monumentales tournées destinées à des publics de quadras et de quincas CSP+ en mal de dévergondage balisé sans défonce et sans alcool.
Le rock serait-il devenu une vieille musique faite par des vieux pour des vieux ? Merde, alors...
Kid Rock s'en donne à coeur joie sur ce nouvel album Rock N Roll Jesus (sortie aujourd'hui), après trois ans de silence discographique, pour notre plus grand bonheur. Beaucoup plus trash bluesy que hip hop cette fois-ci, et agrémenté de quelques mash-ups, mais c'est toujours la même tournerie endiablée.
Expliquez à un américain que Manu Chao est français, il vous rira au nez. C’est pourtant vrai, même s’il vit la plupart du temps à Barcelone et vend des millions de disques à l’international. Ce qui ne l’empêche pas de rester un artiste authentique, ni d'être très détaché, critique et lucide à l’égard du business de la musique.
Malgré le succès dont il jouit désormais à l’international, en Amérique Latine, au Japon ou aux Etats-Unis, l’ancien leader des Hot Pants - son premier groupe, qui écumait 300 scènes par an dans les années 80 - et de la Mano Negra - la formation avec laquelle il a connu ses premiers grands succès commerciaux, avant de repartir à zéro sur des bases plus artisanales - est resté à 46 ans le passionné de musique un peu introverti qu’il était adolescent, lorsque tout a commencé pour lui dans les squats parisiens, à l’âge de 17 ans.
Manu Chao, qui fut l’un des pionniers de la scène rock alternative en France, est un artiste authentique, qui préfère la fréquentation des musiciens des rues catalans – « il y a des titres de mon nouvel album qui sont depuis longtemps des standards pour eux », s’amuse-t-il - à celle des VIP de l’industrie du disque. Autre travers, qu’il cultive volontiers : il n’a jamais appris à manier la langue de bois à l’école.
« Je fulmine quand j’entends dire que les majors paient cher l’évolution du marché, avec la piraterie et tout ça… C’est se foutre du monde. Qui fabrique et vend les machines, la technologie pour pirater les artistes ? Si ce n’est pas exactement les mêmes qui en profitent, c’est leurs cousins, d’autres multinationales », a déclaré au micro de Valli, dans l'émission Système Disque sur France Inter, celui qui se défend pourtant d’être devenu une icône de l’altermondialisme.
Pour le moins en rupture d’industrie, il n’hésite pas à confier que son excellent dernier album, La Radiolina, sera probablement son dernier CD : « Je n’arrêterai pas la musique, mais, vu l’évolution technologique, peut-être que par la suite, dès que j’aurai une nouvelle chanson, je la mettrai en ligne… j’utiliserai mon site Internet comme une station de radio », confiait-il récemment à Courrier International
Que les ventes de disques se portent de moins en moins bien, c’est pour lui une réalité incontournable, et il en tire déjà la leçon. « Il faut penser à de nouvelles manières de diffuser la musique, dit-il. L’avenir, pour nous auteurs, compositeurs, artistes, passe par deux choses : Internet et les concerts. »
Il ne se laisse pas plus affliger par le piratage : « C’est un peu la fin des dinosaures. Les majors sont victimes de leur propre loi du marché : le public choisit le moins cher, voire le gratuit, déclare-t-il. Dans le même temps, d’autres industries, notamment celles qui fabriquent les lecteurs MP3, engrangent les bénéfices. Les uns perdent, les autres gagnent. Et nous, chanteurs, devons trouver notre place pour continuer… »
Dans l’esprit de Manu Chao, le piratage a toujours existé : « Adolescents, quand un ami achetait un album, nous étions 80 à l’enregistrer. Je n’exagère pas : à l’époque, 90 % de ma discothèque était piratée. » Alors qu’il se pratique désormais à grande échelle sur Internet, il préfère parier sur l’éthique du public : « Que les gens piratent les « gros » comme moi, ça ne me gène pas, affirme-t-il. Mais qu’ils fassent l’effort d’acheter la musique des petits labels. »
« Une seule chose ne peut être piratée selon moi : la scène, poursuit Manu Chao. Ceux qui se défendent sur les planches s’en sortiront mieux que ceux qui dépendent du studio. »
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